L’ingénue et le légume

Je ne sais plus parler, je ne sais plus lire, je ne sais plus écrire. Sacrée dégringolade ! Imaginez un peu, moi qui suis naturellement bavarde et amoureuse de lecture, je me retrouve du jour au lendemain muette et analphabète. Et pire, il y a peu d’espoir pour que ça s’arrange.

Que me reste-t-il pour exprimer ma rencontre avec la Chine ? Comment expliquer qu’ici tant de choses me sont étranges, inconnues, mystérieuses ?

Il m’a donc fallu aller chercher au coeur de ce qui lie l’humanité et j’ai enfin trouvé ! La nourriture. Avec le langage, elle est un des éléments vitaux commun à tous les hommes, mais elle est aussi un marqueur essentiel des cultures, de ce qui les différencie les uns des autres. Elle est à la fois lien et distanciation, c’est paradoxal n’est-ce pas ?

Ce sera donc la cuisine qui sera mon prétexte à l’expression de cet écart culturel, ou plus exactement les ingrédients bruts que je croise sur les étals des marchés et qui me sont énigmatiques. Et qui le resteront, faute de pouvoir lire leurs noms, questionner le chaland ou même ouvrir le dictionnaire.

La stupeur a ceci de bon qu’elle permet de faire fonctionner l’imagination, mais aussi la mémoire. Ainsi, comme par enchantement, des textes appris dans ma jeunesse ont parfois refait surface dans mon esprit et sont venus apporter la poésie nécessaire à ces inoffensifs légumes ou fruits transformés en diableries par mon ignorance. Le reste est pure invention.

Forcément le résultat est étonnant et souvent inattendu, mélange étrange de connu et d’inconnu, le tout saupoudré d’humour et d’autodérision, pour sourire, pour rire. Car oui, le rire est aussi un bien commun à l’humanité, dont par les temps qui courent, il serait dommage de se passer !

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J’ ai réalisé un livre d’artiste avec cette série visible ici

 

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